Votre bail commercial est arrivé à son terme et vous venez de recevoir un acte signifié par Commissaire de Justice (anciennement Huissier de Justice) dans lequel votre bailleur refuse de renouveler votre bail et ne vous offre pas le paiement de l’indemnité d’éviction.

Qu’est-ce que l’indemnité d’éviction ? 

En droit des baux commerciaux, deux principes fondamentaux s’opposent : la propriété commerciale du locataire et la propriété immobilière du bailleur.

Ainsi, le bailleur est libre de refuser de renouveler le bail de son locataire (protection de la propriété immobilière) mais il doit en contrepartie lui verser une indemnité d’éviction. 

Il s’agit d’une somme d’argent qui doit être égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement du bail (protection de la propriété commerciale).

Dans quel cas le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans verser d’indemnité d’éviction ? 

Cette situation survient majoritairement lorsque le locataire a commis une faute. 

L’article L.145-17, I, 1°) du Code de commerce énonce, en effet, que le locataire peut être privé de cette indemnité d’éviction si le bailleur parvient à justifier d’un motif grave et légitime à l’encontre de son locataire. 

Quelles sont les obligations que doit respecter le bailleur pour mettre en œuvre ce refus de renouvellement de bail sans paiement de l’indemnité d’éviction ? 

1 - Justifier de l’existence d’un motif grave et légitime 

Le Code de commerce ne définit pas cette notion de motif grave et légitime et ne limite pas non plus les motifs pouvant être invoqués. 

Le motif peut correspondre à une infraction au bail qu’elle résulte d’une violation du statut des baux commerciaux ou des clauses spécifiques de la convention locative. 

Il peut également correspondre à une faute extracontractuelle du locataire à condition qu’elle se rattache par un lien suffisant à l’exécution du bail. 

Exemples de motifs retenus 

  • Non-paiement des loyers et charges,

  • Sous-location illicite, 

  • Cession de bail réalisée en contrevenant aux stipulations du contrat, 

  • Destination non conforme : trafics de stupéfiants, proxénétisme, exercice d’une activité autre que celle prévue par le bail, 

  • Travaux réalisés sans l’autorisation du bailleur … 

  • Violences exercées par le locataire sur le bailleur ou son conjoint, 

  • Accusations mensongères et révélations par le locataire de la vie privée du bailleur, 

2 - Adresser au locataire une lettre de mise en demeure d’avoir à cesser l’infraction dans un délai d’un mois

Le bailleur doit impérativement adresser une lettre de mise en demeure au locataire d’avoir à cesser l’infraction. 

Cette lettre doit laisser au locataire un délai d’un mois pour se conformer aux exigences de son bail ou mettre fin à son comportement fautif. 

A défaut, le locataire conservera son droit au paiement de l’indemnité d’éviction. 

La lettre de mise en demeure est inutile lorsque l’infraction est irréversible et instantanée (le locataire ne peut plus réparer les conséquences et les effets de son comportement fautif). 

Cette lettre de mise en demeure doit être signifiée par Commissaire de Justice et prend la forme d’une sommation ou d’un commandement. 

3 - Démontrer que cette infraction s’est poursuive ou renouvelée après le délai d’un mois

Le locataire commercial dispose d’un délai d’un mois pour cesser l’infraction. 

Il faut donc qu’à l’issue de ce délai, la cessation de l’infraction soit effective. Par exemple, en cas de sous-location irrégulière, le fait que le locataire adresse une simple mise en demeure au sous-locataire d’avoir à quitter les lieux ne suffit pas. Il doit aller plus loin : lui délivrer une sommation de quitter les lieux, saisir le juge afin d’obtenir son expulsion…

Mes conseils  

En tant que locataire commercial, vous disposez de moyens pour vous défendre : 

  • Vous pouvez soulever l’irrégularité de la lettre de mise en demeure : absence de motif clair et précisé, absence de visa de l’article L.145-17, I, 1°) du Code de commerce et de reproduction de ses termes. 
    La lettre de mise en demeure sera donc nulle. Le bailleur pourra toutefois en délivrer une nouvelle. 

  • Vous pouvez critiquer le motif invoqué par le locataire : motif insuffisant, motif non justifié …

  • Vous pouvez démontrer que l’infraction a cessé dans le délai d’un mois. 

Avant toute action judiciaire, il est toujours utile d’en discuter avec votre bailleur et de répondre à cet acte de refus par lettre officiel d’un avocat. 

Si aucun accord ne peut être trouvé, vous pourrez saisir le juge afin de solliciter la nullité des motifs invoquer par votre bailleur et obtenir sa condamnation au paiement d’une indemnité d’éviction.

Pour toute information supplémentaire, n’hésitez pas à me contacter.